Christian BOBIN (né en 1951 - 23/11/2022) (146 citations).


Citations de Christian Bobin. Article publié le 01/06/2013 à 10H11 et mis à jour le 15/02/2024 à 8H56. Conseils de lecture de l'œuvre de Christian Bobin : Pierre.

"Ton noir m'absorbe." (Christian Bobin In Pierre.- Paris : Gallimard, 11/2019, p. 22).

"Les livres même les plus sombres amènent la vie la joie chassent la tristesse." (Christian Bobin In La Vie passante.- Editions Fata Morgana, 1990, p. 18).

"On peut fort bien vivre une vie que l'on ne vit pas. On peut indéfiniment supporter ce que l'on ne supporte plus." (Christian Bobin In Cœur de neige.- Paris : Ed. Fario, 2023, p. 15, Collection Théodore Balmoral).

"Pour garder une bonne perspective de sa propre importance, chaque personne devrait avoir un chien qui l'adore et un chat qui l'ignore." (Christian Bobin cité par Stéphane Garnier In Le chat en 500 citations.- Paris : Ed. de l'Opportun, 01/2019, p. 52).

"La confiance est la capacité enfantine d'aller vers ce qu'on ne connaît pas comme si on le reconnaissait." (Christian Bobin cité par Charles Pépin In La confiance en soi.- Paris : Allary Editions, 03/2018, p. 12).

"Emily avait cinquante-cinq ans. Personne dans la ville d'Amherst n'a vu son visage depuis un quart de siècle." (Christian Bobin In La Dame blanche.- Paris : Gallimard, p. 10, Folio : 4863).

"L'écriture est à elle-même sa propre récompense." (Christian Bobin In La Dame blanche.- Paris : Gallimard, p. 15, Folio : 4863).

"Quelques heures passent qui ne sont rien. Le temps n'entre pas chez les morts." (Christian Bobin In La Dame blanche.- Paris : Gallimard, p. 16, Folio : 4863).

"Les poèmes serrés sur le papier diffusent la même lumière d'or que le blé rassemblé en meules dans le pré." (Christian Bobin In La Dame blanche.- Paris : Gallimard, p. 36, Folio : 4863).

"Bach est plus que musicien. Soulages est plus que peintre." (Christian Bobin In Pierre.- Paris : Gallimard, 11/2019, p. 7).

"Je suis au bord de tout comprendre. Cela m'arrive mille fois par jour. Au bord, pas plus." (Christian Bobin In Pierre.- Paris : Gallimard, 11/2019, p. 9).

"La voix de Pierre Soulages, c'est la grotte de Lascaux au fond de la gorge." (Christian Bobin In Pierre.- Paris : Gallimard, 11/2019, p. 9).

"Les gens glorieux poussent leur nom un mètre devant eux, s'appuient sur lui -comme sur un déambulateur. S'ils ne l'ont plus, ils tombent." (Christian Bobin In Pierre.- Paris : Gallimard, 11/2019, p. 16).

"J'écris. Je n'ai jamais connu d'autre habitation que la phrase à venir." (Christian Bobin In Pierre.- Paris : Gallimard, 11/2019, p. 27).

"Ta peinture travaille à réparer, restaurer, relancer le flux de la vie, à faire que rien ne rouille, pas même la rouille." (Christian Bobin In Pierre.- Paris : Gallimard, 11/2019, p. 32).

"[...] J'appuie ma main sur quelques outre-noirs. Ce geste est interdit dans les musées. C'est un blasphème. Son auteur mérite la peine de mort. Je ne respecte rien, Pierre. J'aime." (Christian Bobin In Pierre.- Paris : Gallimard, 11/2019, p. 82).

"J'aime l'amour, Albe. Je l'aime comme on aime l'orage -pour sa fraîcheur et sa brûlure. Mais quoi, on ne peut pas raisonnablement vivre dans le déluge perpétuel." (In La femme à venir : récit, p. 126).

"Je n'ai pas de devoir à rendre. J'ai un livre à faire pour la lumière qu'il me donnera." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 11).

"Il pleut. Depuis maintenant trois jours il pleut. La pluie c'est l'écriture quand l'écriture se fait comme elle devrait toujours se faire : à l'insu de son auteur, en dehors de toute volonté claire d'un livre. Je regarde les gouttes d'encre glisser sur la vitre de papier blanc, j'attends une éclaircie." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), pp. 18-19).

"Je crois que l'enfance est pour beaucoup dans ces refus dont nous ressentons la nécessité sans savoir les justifier. Je crois qu'il n'y a qu'elle à écouter." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 24).

"La solitude, quand elle monte dans un couple, est terrible, malfaisante. Quand elle entre chez moi elle est -comment dire : détendue." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 25).

"Mes parents ont dû me tenir beaucoup de discours. Tous les parents sont comme ça. Et je n'écoutais rien. Aucun enfant n'écoute. Ce que je tiens de mes parents, je le tiens de la contemplation du mouvement de leur vie." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 25).

"Je crois que c'est ça un artiste. Je crois que c'est quelqu'un qui a son corps ici et son âme là-bas, et qui cherche à remplir l'espace entre les deux en y jetant de la peinture, de l'encre ou même du silence." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 30).

"Allant et revenant, j'avance dans ce livre à la manière des écureuils dans les parcs, par bonds, retours et immobilités soudaines." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 31).

"Je pense que les économistes ne connaissent rien à l'économie : le chômage n'est pas l'absence de travail mais sa présence soudain trop grande, le règne sans contrepoids du travail fou, de l'idée maladive qu'il faut travailler pour avoir droit de vivre." (Christian Bobin In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 31).

"Et c'est quoi, la fin d'un livre. C'est quand vous avez trouvé la nourriture qu'il vous fallait, à ce jour, à cette heure, à cette page." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 34).

"Si les parents savaient à quel point ils sont pour peu dans le devenir de l'enfant, ils en seraient effrayés : quelques images de film, quelques phrases d'un livre ont décidé de ma vie plus que tout le reste." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 39).

Ecrire, c'est se découvrir hémophile, saigner de l'encre à la première écorchure, perdre ce qu'on est au profit de ce qu'on voit." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 61).

"Je ne cherche jamais l'écriture. C'est elle qui me vient. C'est quelque chose qui sort du monde et qui me blesse." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 61).

"Ce qui nous incite à chercher c'est l'espérance et elle est inépuisable, même chez le plus désespéré des hommes. Personne ne peut vivre une seconde sans espérer." (Christian Bobin In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 69).

"Toute lecture qui ne bouleverse pas la vie n'est rien, n'a pas eu lieu, n'est pas même du temps perdu, est moins que rien." (In L'épuisement : un orage. Paris : Gallimard, 2015, (Folio), p. 71).

"Mes manques, pourquoi m'en plaindre, c'est ça aussi qui me fait écrire." (Extrait de l'Emission La Grande Librairie  présentée par François Busnel et diffusée sur France 5 le 15/10/2015).

"Je crois en la fonction ressuscitante du langage et de la parole." (Extrait de l'Emission La Grande Librairie  présentée par François Busnel et diffusée sur France 5 le 15/10/2015).

"Ma vie s'était passée dans les livres, loin du monde et j'avais, sans le savoir, fait avec mes lectures ce que les oiseaux par instinct font avec les branches nues des arbres : ils les entaillent et les triturent jusqu'à en détacher une brindille bientôt nouée à d'autres pour composer leur nid." (In Louise Amour, p. 10).

"Si j'écrivais, c'était pour fuir le monde, pas pour le servir." (In Louise Amour, p. 11).

"Je lui parlerais de ma répugnance pour le monde de luxe où l'on accorde plus de soins à une montre ou à un carré de soie qu'à un mourant." (In Louise Amour, p. 11).

"Triompher dans le monde, c'est avoir tout perdu." (In Louise Amour, p. 12).

"Les fugues cessèrent, pas ma détestation du monde et des adultes. Ces gens qui s'embrassaient sans s'aimer et se parlaient sans rien se dire. Je refusais obstinément de vivre dans l'antarctique des gens normaux." (In Louise Amour, p. 15).

"Je ne voulais que respirer et dès que je sus lire, je partis dans le grand air des livres." (In Louise Amour, p. 16).

"Je me fis un capuchon de papier-livres que je rabattis sur ma tête et, assis sur une marche d'escalier ou allongé sur un lit, je lus pendant des années, cherchant sans impatience le ciel, les anges ou même les morts : tout sauf le monde." (In Louise Amour, p. 16).

"Les conventions écrasaient les visages. L'écriture les défroissait et leur rendait leur vraie clarté." (In Louise Amour, p. 18).

"Le visage d'une mère est pour l'enfant son premier livre d'images." (In Louise Amour, p. 23).

"Marcher dans Paris ne m'était pas agréable. C'était comme obéir à un monstre qui m'imposait un pas rapide et me jetait sans arrêt au visage des milliers de visages, tous possédés par la même fièvre qui remplissait les vitrines et faisait rouler les voitures : vendre, acheter, paraître, écraser, voilà ce que me chuchotait sans fin la ville barbare." (In Louise Amour, p. 24).

"J'avais grandi à la campagne. Je me sentis dans ce lieu et devant cet homme, maladroit et disgracieux -comme une tasse en plastique dans un magasin de porcelaine." (In Louise Amour, p. 25).

"Un enfant ne sait pas que le jour qu'il vit est extraordinaire et qu'il ne reviendra plus jamais." (In Louise Amour, p. 36).

"Personne, jamais, ne fera voir à un homme amoureux ce qu'il ne veut pas voir." (In Louise Amour, p. 48).

"Les livres étaient ma ligne de fuite. Je les ouvrais avec une lenteur religieuse et, vite, je me glissais dedans comme un petit animal traqué bondit dans son terrier." (In Louise Amour, p. 50).

"Beaucoup de femmes promenaient dans ces lieux la très haute idée qu'elles avaient d'elles-mêmes." (In Louise Amour, p. 51).

"Un prénom est un tout petit carré de langage trempé de ciel et il me semblait indigne d'en faire un objet de mode, une griffe de couturier, ou de parfumeur." (In Louise Amour, p. 60).

"Son absence jetait de l'ombre sur tout, comme si une géante avait recouvert de ses jupons la terre entière -villages, routes et projets." (In Louise Amour, p. 104).

"Un homme s'approcha de moi. Il me tendit une assiette de conversation : elle contenait quelques paroles, de quoi nous nourrir trente secondes, après quoi je le vis reprendre l'assiette. Il n'y avait rien à attendre de telles soirées. Il n'y avait jamais eu une âme dans le monde." (In Louise Amour, p. 123).

"La vie cache les vivants. Elle les soûle, elle les empêtre dans mille liens futiles, elle les remplit comme des épouvantails avec la paille des soucis ou le papier chiffon des projets." (In Louise Amour, p. 133).

"Elle écrit dans un carnet toutes les raisons de mourir, mais le carnet est trop petit." (In La femme à venir : récit, p. 30).

"La lecture, c'est pratique, ça vous prend dans ses bras et ça vous emmène toute légère jusqu'au sommeil, jusqu'à l'oubli." (In La femme à venir : récit, p. 51).

"Les mots la giflent, comme la pluie le tendre feuillage d'automne." (In La femme à venir : récit, p. 100).

"Le grand charme de ne pas chercher à plaire. Elle a une manie : elle dit toujours la vérité. Elle la dit à sa manière, ce qui fait qu'on ne la comprend pas tout de suite. Des mots trop simples, une voix sans effet. Une vérité non tempérée. C'est bien plus tard que l'on comprend. C'est bien plus tard qu'on se rend compte que quelqu'un vous a parlé -comme jamais dans la vie." (In La femme à venir : récit, p. 113).

"Cette conversation -comme toutes les conversations- est un jeu de société. Le but est d'amener l'autre au silence." (In La femme à venir : récit, p. 133).

"L'amour que je vous porte est sévère. Il a ruiné par avance tout ce qui pourrait m'en guérir." (In La femme à venir : récit, p. 136).

"La misère dont témoignent nos attachements n'est pas à reprocher à l'amour. Il vaudrait mieux se demander ce qui nous rend si difficile d'aimer quelqu'un sans aussitôt l'attacher à notre sort, ce qui revient à se demander pourquoi il nous est si difficile d'aimer." (In L'éloignement du monde, p. 16).

"Certaines choses s'enfuient dès qu'on se met à les attendre. Nous avons beau les appeler : si douce soit notre voix, elles n'y entendent que notre avidité et elles se retirent au plus loin de nous, en elles, là où nous ne saurons plus les blesser." (In L'éloignement du monde, p. 18).

"L'émerveillement crée en nous un appel d'air." (Christian Bobin In L'éloignement du monde, p. 22).

"Nous passons notre vie devant une porte sans voir qu'elle est grande ouverte et que ce qui est derrière est déjà là, devant nos yeux." (In L'éloignement du monde, p. 29).

"Ce qui est dit n'est jamais entendu tel que c'est dit : une fois que l'on s'est persuadé de cela, on peut aller en paix dans la parole, sans plus aucun souci d'être bien ou mal entendu, sans plus d'autre souci, que de tenir sa parole au plus près de sa vie." (In L'éloignement du monde, p. 36).

"Ecrire, c'est porter un soin extrême à ce que l'on fait -chose évidemment impossible dans la vie où l'on se contente de faire attention à l'essentiel en négligeant le reste, oubliant que l'essentiel n'est rien d'autre que ce que l'on néglige." (In L'éloignement du monde, p. 40).

"Quant aux lieux "favorables à l'écriture", je ne crois pas qu'il y en ait, pas plus que de lieux favorables à l'amour." (In L'éloignement du monde, p. 43).

"Avant d'entrer dans la maison où il est aujourd'hui, mon père a séjourné pendant quelques semaines chez les morts, à l'Hôpital psychiatrique de Sevrey, près de Châlon sur Saône dans le pavillon "Edelweiss". Les morts n'étaient pas les malades mais les infirmiers qui les abandonnaient pour la journée entière sans aucun soin de parole." (In La présence pure, p. 12).

"Le grand malheur de croire que l'on sait quelque chose." (In La présence pure, p. 18).

"J'aime appuyer ma main sur le tronc d'un arbre devant lequel je passe, non pour m'assurer de l'existence de l'arbre -dont je ne doute pas- mais de la mienne." (In La présence pure, 1999, p. 25).

"Ces gens dont l'âme et la chair sont blessées ont une grandeur que n'auront jamais ceux qui portent leur vie en triomphe." (In La présence pure, p. 31).

"C'est par les yeux qu'ils disent les choses, et ce que j'y lis m'éclaire mieux que les livres." (In La présence pure, p. 31).

"La maison de long séjour est appelée ici "maison de cure". Les infirmes, les vieillards et les agonisants qui la peuplent sont appelés des "résidents". Plus les choses sont dures, plus on leur donne des noms faibles." (In La présence pure, p. 32).

"Il est impossible de protéger du malheur ceux qu'on aime : j'aurai mis longtemps pour apprendre une chose aussi simple. Apprendre est toujours amer, toujours à nos dépens. Je ne regrette pas cette amertume." (In La présence pure, p. 42).

"La maladie d'Alzheimer enlève ce que l'éducation a mis dans la personne et fait remonter le coeur en surface." (In La présence pure, p. 47).

"Mon père, lui, n'a plus ce souci des apparences. Plusieurs fois je l'ai vu se pencher comme un adorant devant des malades particulièrement disgraciés et leur dire : "Vous avez un merveilleux visage, je ne vous oublierai jamais." Cette scène à chaque fois me bouleverse comme si l'infirmité pendant un instant n'était plus dans le camp de mon père mais dans le mien." (In La présence pure, p. 51).

"La vérité vient de si loin pour nous atteindre que, lorsqu'elle arrive près de nous, elle est épuisée et n'a presque plus rien à nous dire. Ce presque rien est un trésor." (In La présence pure, p. 58).

"La vérité est ce qui brûle. La vérité est moins dans la parole que dans les yeux, les mains et le silence. La vérité, ce sont des yeux qui brûlent en silence." (In La présence pure, p. 62).

"Le mélancolique est celui qui est persuadé d'avoir tout perdu -sauf sa mélancolie à quoi il tient farouchement. C'est la maladie de celui qui, dépité de n'être pas tout, choisit, par un revers enfantin de l'orgueil, de n'être rien, ne gardant du monde que ce qui lui ressemble : le morne et le pluvieux." (In L'inespérée, p. 15).

"La vulgarité, on dit aux enfants qu'elle est dans les mots. La vraie vulgarité de ce monde est dans le temps, dans l'incapacité de dépenser le temps autrement que comme des sous." (In L'inespérée, p. 23).

"Les journalistes de télévision font pitié avec leur manque parfait d'intelligence et de cœur -cette maladie du temps qu'ils ont, héritée du monde des affaires : parlez-moi de Dieu et de votre mère, vous avez une minute et vingt-sept secondes pour répondre à ma question." (In L'inespérée, p. 23).

"Au regard du monde, les gens de pouvoir tiennent la place la plus haute. Au regard de l'esprit, ils occupent la place la plus basse et n'appellent que cette compassion que l'on éprouve devant les lourdes infirmités." (In L'inespérée, p. 45). 

"La vie en société c'est quand tout le monde est là et qu'il n'y a personne. La vie en société c'est quand tous obéissent à ce que personne ne veut." (In L'inespérée, p. 50).

"Ce sont plutôt les femmes qui veulent le mariage. Elles le veulent d'une volonté absolue, folle. L'homme le subit, on dirait. Il y entre comme on entre dans un nouvel emploi. Il y apprend les règles comme un enfant apprend ses leçons, en râlant. C'est parce qu'il attend peu du mariage que l'homme n'en désespère pas et qu'il ne voudra plus en sortir même en cas de faillite -comme on tient à un emploi qui ne vous donne plus de plaisir mais assure toujours vos fins de mois. Les femmes, c'est différent." (In L'inespérée, p. 95).

"Les hommes c'est comme tout le monde, les femmes c'est comme personne." (In L'inespérée, p. 95).

"C'est une chose qui arrive souvent : on peut rester dix ans célibataire dans un mariage. On peut parler des heures sans dire un mot." (In L'inespérée, p. 102).

"L'on ne peut pas écrire une lettre d'amour au téléphone. Ce n'est pas que la voix ne suffise pas, c'est au contraire qu'elle est de trop." (In L'inespérée, p. 114).

"J'écris ce livre pour tous ces gens qui ont une vie simple et très belle, mais qui finissent par en douter parce qu'on ne leur propose que du spectaculaire." (In Prisonnier au berceau, p. 10).

"J'étais le plus jeune prisonnier de France. J'allais de ma chambre à la cour et de la cour à ma chambre. Je passais chaque été enfermé dans la maison, à arpenter le cloître des lectures, goûtant à la miraculeuse fraîcheur de telle ou telle phrase." (Christian Bobin In Prisonnier au berceau, p. 13).

"Le temps me rentrait son poing dans la gorge et m'étouffait lentement." (In Prisonnier au berceau, p. 14).

"Le bruit que fait un dimanche en province est à peine audible. Il est comme l'intervalle de silence entre la chute d'une goutte d'eau dans l'évier, et la chute de la goutte d'eau suivante." (In Prisonnier au berceau, p. 14).

"Mes maîtres à l'école m'ont pendant des années parlé en vain : je n'ai rien retenu de ce qu'ils m'enseignaient, peut-être parce qu'ils le tiraient de leurs certitudes et non de l'ignorance printanière de leurs âmes." (In Prisonnier au berceau, p. 14).

"Un pacte se noue entre l’âpreté silencieuse de la vie et la douceur inouïe de quelques mots sur une page." (In Prisonnier au berceau, p. 21).

"J'ai toujours eu du mal à aller dans le monde. Celui-ci commençait dès le franchissement du seuil de la maison familiale : je faisais un pas dehors et j'étais déjà à l'étranger." (In Prisonnier au berceau, p. 23).

"Les paroles comme des mouches s'agglutinaient sur le ruban collé des convenances." (In Prisonnier au berceau, p. 26).

"Aux enfants on apprenait jadis que Dieu est dans le ciel. Mais qui leur apprendra que le ciel est sur terre, partout étincelant dans les choses simples ? (In Prisonnier au berceau, p. 31).

"Une fois par semaine ma sœur Danielle passait la soirée dans une salle paroissiale où il y avait une bibliothèque. Je luttais contre le sommeil pour découvrir à son retour les livres qu'elle avait choisis pour moi. Un coup d’œil sur les titres et les couvertures, et je m'endormais au seuil du paradis." (In Prisonnier au berceau, p. 58).

"Je sentais que je ne trouverais de l'aide qu'à condition de n'en chercher aucune." (In Prisonnier au berceau, p. 58).

"Lire, c'est débroussailler dans son âme un chemin que les ronces et les arbres effondrés ont depuis longtemps recouvert." (In Prisonnier au berceau, p. 69).

"Les gens croient montrer leur profondeur quand ils brassent des opinions. Mais les opinions sont des branches mortes flottant sur l'eau croupie de l'époque." (In Prisonnier au berceau, p. 76).

"Ma joie fut grande le jour où je découvris l'existence d'Emily Dickinson : elle me confirmait qu'il n'était pas nécessaire de courir le monde pour vivre la vie la plus intense." (In Prisonnier au berceau, p. 77).

"En 1860, à trente ans, Emily ferma sur elle la porte de sa maison puis elle monta dans la chambre nuptiale de son âme et n'en sortit qu'en 1886, au jour de sa mort. Elle écrivit entre-temps des centaines de poèmes dont chacun contenait plus de lumière que toute la voie lactée." (In Prisonnier au berceau, p. 77).

"La cage des conventions qui est autour des gens s'ouvre parfois. Les barreaux des paroles prévisibles sont sciés par la lime d'un silence ou d'une fatigue et la personne apparaît alors dans toute sa royauté." (In Prisonnier au berceau, p. 80).

"Chacun, même le plus perdu des hommes, a dans son âme une chaumière, avec une clochette à l'entrée. Le vent parfois la fait bouger." (In Prisonnier au berceau, p. 88).

"A quinze heures je désespère de tout, à quinze heures une minute tous les chemins se rouvrent." (In Prisonnier au berceau, p. 89).

"Je ne vis pas tout le temps. Je ne suis pas vivant pendant une journée entière. Qui l'est ?" (In Autobiographie au radiateur, p. 14).

"Je lis Hölderlin. Je devrais dire, plus justement : je le bois. Ses poèmes sont comme une eau de torrent." (In Autobiographie au radiateur, p. 17).

"De chacun de ceux que je rencontre j'attends quelque chose, et je le reçois puisque je l'attends." (In Autobiographie au radiateur, p. 17).

"La vie, je la trouve dans ce qui m'interrompt, me coupe, me blesse, me contredit. La vie, c'est celle qui parle quand on lui a défendu de parler, bousculant prévisions et pensées, délivrant de la morne accoutumance de soi à soi." (In Autobiographie au radiateur, p. 24).

"Je ne cherche pas la perfection. Cela me semblerait aussi intelligent que de rechercher la mort. Je cherche la justesse." (In Autobiographie au radiateur, p. 24).

"J'ai été, dans l'enfance, lecteur de l'Evangile à la messe du dimanche. [...]. Au bout de deux mois je fus renvoyé : le prêtre me reprochait de mettre le ton". (In Prisonnier au berceau, p. 31).

"Le souci de soi est une chose qui encombre les vivants. Peut-être est-ce le premier sac de sable que les morts jettent par-dessus leur nacelle, pour bondir au plus haut, hors de vue." (In Autobiographie au radiateur, p. 42).

"L'art de la conversation est le plus grand art. Ceux qui aiment briller n'y entendent rien. Parler vraiment, c'est aimer, et aimer vraiment, ce n'est pas briller, c'est brûler." (In Autobiographie au radiateur, p. 54).

"Faire au moins une fois ce qu'on ne fait jamais. Suivre, ne serait-ce qu'un jour, une heure, un autre chemin que celui où le caractère nous a mis." (In Autobiographie au radiateur, p. 77).

"C'est l'imprévu que j'espère, et lui seul. Partout, toujours. Dans les plis d'une conversation, dans le gué d'un livre, dans les subtilités d'un ciel. Je le guette autant que je l'espère." (In Autobiographie au radiateur, p. 79).

"Les techniques modernes pour relier les individus les uns aux autres visent toutes à une seule chose : réduire à l'extrême le délai entre un désir et sa réalisation." (In Autobiographie au radiateur, p. 91).

"Finalement, je n'aime pas la sagesse. Elle imite trop la mort. Je préfère la folie -pas celle que l'on subit, mais celle avec laquelle on danse." (In Autobiographie au radiateur, p. 92).

"Vous m'incitez à parler de mes livres. Cette demande, bien sûr, est bienveillante. Mais j'ai appris à mes dépens -ce qui est la plus fraîche manière d'apprendre- que certaines manières de nous aimer ne savent que nous nuire. Voici comme je vous entends : "Venez affaiblir vos livres en en bavardant avec nous."" (In Autobiographie au radiateur, p. 94).

"Ce que je connais, je ne l'écris pas. Ce que je ne connais pas, je l'écris." (In Autobiographie au radiateur, p. 95).

"Ce que je trouve est mille fois plus beau que ce que je cherche." (In Autobiographie au radiateur, p. 96).

"Je lis les livres de poésie comme les femmes fouillent dans les boîtes où sont empilés des tissus, à l'époque des soldes : je prends un poème, je le quitte, je regarde celui qui le suit, je saute des pages, je reviens sur ma première lecture, j'hésite, je réfléchis, je ne réfléchis plus et j'emporte une image, heureux pour la journée, certain d'avoir fait une bonne affaire." (In Autobiographie au radiateur, p. 100).

"Au début de cette année, j'ai connu la joie de donner la moitié de ma bibliothèque. Je me suis délivré des livres qu'une seule lecture éteint." (In Autobiographie au radiateur, p. 123).

"Plus rien que le présent, et dans le présent, du blanc, le vide. Aucune cause apparente. Aucune explication à ce désastre intime. Cela s'est vu. Quelqu'un m'a demandé : qu'est-ce qui t'arrive ? Je n'ai pas su répondre. La question n'était pas la bonne. Il ne m'arrivait rien, justement : plus rien ne m'arrivait et, derrière mon visage, il n'y avait plus personne. J'avais si peu de consistance que les voyageurs auraient pu me traverser sans s'en rendre compte." (In Autobiographie au radiateur, p. 128).

"Vouloir plaire -c'est mettre sa vie dans la dépendance de ceux à qui l'on veut plaire et de cette part en eux, infantile, qui veut sans fin être comblée." (In Autobiographie au radiateur, p. 133).

"Très tôt j'ai su ce que je ne voulais pas. Cela correspondait à l'ensemble de ce qui m'était proposé comme avenir. Un mariage, un travail. Des objets, des horaires. Les vivants qui s'accommodent d'aussi peu font semblant de vivre : voilà ce qu'alors je pensais." (In Autobiographie au radiateur, p. 135).

"Je lis beaucoup. Ce n'est sans doute pas très sain de toujours avaler de l'encre." (In Autobiographie au radiateur, p. 150).

"Un seul père, une seule mère, c'est bien trop juste. Pour accompagner l'enfant dans sa navigation d'enfance, il en faudrait au minimum dix, vingt." (In La folle allure : roman, p. 22).

"Le temps, j'en ai toujours eu besoin pour faire ce que j'avais à faire : rien." (In La folle allure : roman, p. 23).

"J'ai voulu une vie que l'on ne pourrait pas résumer, une vie comme la musique -pas comme le marbre ou le papier." (In La folle allure : roman, p. 24).

"Elle ne croyait pas au monde, ma mère, et là-dessus je suis bien sa fille." (In La folle allure : roman, p. 33).

"J'ai toujours craint ceux qui partent à l'assaut de leur vie comme si rien n'était plus important que de faire des choses, vite, beaucoup." (In La folle allure : roman, p. 33).

"Je n'ai jamais compris ce qu'on pouvait apprendre à un enfant en faisant tomber sur lui un déluge de cris et d'eau glacée." (In La folle allure : roman, p. 36).

"On arrive en banlieue parisienne, à Créteil. Il me suffit de regarder la barre des immeubles : ces endroits sont voués à la disparition. Ils n'ont même été bâtis que pour ça. Tellement de visages et personne pour les voir." (In La folle allure : roman, p. 43).

"Il y a plusieurs maladies dans la vie. Ma mère, par exemple, c'est la maladie de ne rien prendre au sérieux. C'est une maladie bénigne qui n'atteint aucune fonction vitale. Mon père, lui, c'est une maladie incurable, celle de la perfection. Tout doit être fait au mieux et le mieux ce n'est jamais ça, jamais, jamais. C'est un mal éprouvant pour l'entourage." (In La folle allure : roman, p. 53).

"Je viens de comprendre quelque chose, une chose capitale, une révélation si on veut. Je viens de comprendre que personne, jamais, ne me contraindra en rien. Personne. Jamais. En rien." (In La folle allure : roman, p. 55).

"J'ignore ce que c'est faire le "bien". On m'a souvent parlé "pour mon bien" et cela me rendait sourde, mais ce n'est sûrement pas la même chose. A moins que ce ne soit simplement ne pas faire le mal -et ce serait déjà beaucoup." (In La folle allure : roman, p. 57).

"Parce que je la quitte régulièrement, j'apprends ce que c'est une famille : cela tient de la source et de l'eau croupie. Passé un certain temps, l'enfant ne peut plus qu'en partir : il lui est devenu impossible de s'y faire entendre -parce qu'on le connaît trop et parce qu'on ne le connaît plus." (In La folle allure : roman, p. 65).

"Je ne peux pas regarder et écouter en même temps. Les mots disent une chose, les présences en disent une autre." (In La folle allure : roman, p. 66).

"On m'y accueille à bras ouverts, c'est du moins ce que je crois. Quelques jours passent, et je comprends que, dans ces familles-là, on n'accueille pas, on observe." (In La folle allure : roman, p. 68).

"Tous ces gens semblaient disposer d'un temps infini. Chacun écoutait l'autre sans l'interrompre, sans l'abrutir de questions ou, pire encore, de réponses." (In La folle allure : roman, p. 78).

"Oui, il me semble parfois que tous nos sentiments, même les plus profonds, ont une part indélébile de comédie. Leur profondeur ne doit souvent rien à l'amour -et tout à l'amour propre." (In La folle allure : roman, p. 85).

"J'ai un problème avec la parole depuis quelques jours : elle m'ennuie. Je n'ai plus envie de parler et moins encore envie qu'on me parle." (In La folle allure : roman, p. 102).

"Je ne sais pas ce qui est le pire -de ne s'adapter en rien au monde, ou de s'y adapter en tout, des fous ou des gens convenables, convenus." (In La folle allure : roman, p. 116).

"Je comprends très bien que les nourrissons passent leur temps à dormir. Ils font un travail proprement exténuant : ils tètent une goutte de réel, une goutte seulement, [...] une larme de réel qui tombe sur leur âme blanche comme de l'huile sur le feu." (In La folle allure : roman, p. 132).

"J'essaie de vous dire une chose si petite que je crains de la blesser en la disant." (In L'homme-joie, p. 14).

"Si mes phrases sourient c'est parce qu'elles sortent du noir. J'ai passé ma vie à lutter contre la persuasive mélancolie. Mon sourire me coûte une fortune." (In L'homme-joie, p. 17).

"J'ai lu plus de livres qu'un alcoolique boit de bouteilles. Je ne peux m'éloigner d'eux plus d'un jour. Leurs lenteurs ont des manières de guérisseur." (In L'homme-joie, Vita Nova, p. 113).

Aimer, c'est prendre soin de la solitude de l'autre sans jamais prétendre la combler, ni même la connaître." (In Le dico philo : citations rassemblées par Benoit Marchon. Actes Sud Junior. 2004. p. 9).

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