Hermann HESSE (1877 - 1962) (42 citations).


                                                   Photo : © Suhrkamp Verlag, Berlin

"De la même manière, j'essaierai toujours, moi qui suis poète, de dominer le monde grâce à la pensée au lieu de me servir de l'art. Je m'engage inlassablement sur ces voies infinies, pénibles et isolées ; je persiste à employer la raison et, au bout du compte, je ne récolte que souffrance et solitude. Pourtant, malgré ces échecs répétés, je renais invariablement à la vie." (In Le curiste, p. 176).

"Il est possible de considérer la névrose non comme une maladie, mais comme un processus de sublimation à la fois douloureux et extrêmement constructif. C'est là une idée séduisante, mais il est plus important de vivre les choses que de les théoriser." (In Le curiste, p. 43).

"Le travail littéraire comporte une telle exigence de concentration que lorsque l'écrivain est entièrement tendu dans un élan de production, il est tout à fait capable d'ignorer les dérangements et les perturbations extérieurs." (In Le curiste, p. 101).

"Je me réfugiai dans un univers idéal qui perdit cependant rapidement son attrait et son charme envoûtant. Après une courte promenade à travers ce dédale de rêveries, mon désir s"étiola et je fus obligé de reconnaître qu'il correspondait uniquement à un moment d'exaltation passagère." (In Le curiste, p. 110).

"Malheureusement, je m'attends toujours à des merveilles et place mes espoirs excessivement haut. Lorsque je rencontre quelqu'un de sympathique, je lui attribue d'emblée des qualités supérieures, j'exige même qu'il en fasse preuve et je suis désenchanté et triste quand je réalise que je me suis trompé." (In Le curiste, p. 121).

"Cette fois-ci, je rentrais chez moi ; c'était le retour à ma cage, au froid et à l'exil." (In Le voyage à Nuremberg, p. 124).

"Je n'ai plus aucun goût au travail et à la réflexion. C'est  à peine si j'aime encore lire. Enfin, j'ai perdu toute fraîcheur ainsi que toute énergie spirituelle et physique. Cette situation est déjà assez préoccupante en elle-même et pourtant, je suis bien obligé d'avouer quelque chose de plus honteux ; il y a plus grave encore. Je commence en effet à m'abandonner au côté superficiel et abêtissant, à la monotonie et au côté dépravé de l'existence paresseuse des curistes." (In Le curiste, p. 125).

"C'est incroyable ce qu'on apprend vite à faire des choses moralement répréhensibles et absurdes, ce qu'on devient facilement un misérable fainéant, un sale jouisseur plein de graisse." (In Le curiste, p. 126).

"Ce que je fais est interdit, c'est un péché contre tout ce que je connais de bon et de sacré, envers cet univers idéal auquel je serais si heureux de prendre part." (In Le curiste, p. 129).

"Je suis coupable d'avoir des conversations aussi absurdes qu'inutiles et d'approuver les autres de façon paresseuse et machinale." (In Le curiste, p. 130).

"Mon expérience passée m'avait aussi fait connaître l'autre chemin, celui qui permet d'accéder au bonheur, à la grâce et à un monde merveilleux. Mais je savais qu'il était inutile de le chercher indéfiniment. Il fallait attendre qu'il surgisse." (In Le curiste, p. 151).

"Pourquoi considérer qu'un comportement naturel est nécessairement une preuve de faiblesse, pourquoi interdire les choses saines et évidentes ?" (In Le curiste, p. 170).

"Je pensais probablement un peu différemment il y a vingt ans, mais ma manière de ressentir les choses, ma façon d'être, de désirer et d'espérer est restée fondamentalement inchangée ; elle n'est pas devenue plus intelligente ou plus bête. Je suis toujours capable d'être tantôt un enfant, tantôt un vieil homme ; parfois j'ai deux ans, parfois j'en ai mille." (In Le curiste, p. 175).

"Ils recherchaient finalement ce que moi-même j'essaie d'atteindre en avouant mes faiblesses et en écrivant des livres : une vision claire des choses, un réconfort, une justification et un nouvel enthousiasme, une nouvelle innocence et un nouvel amour de la vie." (In Le curiste, p. 178).

"Au cours de mon existence, j'ai éprouvé mille fois un sentiment de joie exubérante ou de fatigue extrême ; mille fois je me suis comporté en enfant ou en vieil homme froid et insensible. Mais ces états successifs n'ont pas duré longtemps. Les choses se sont répétées sans se ressembler." (In Le curiste, p. 186).

"J'éprouve un besoin impérieux de calme et de solitude. Je me sens las et exaspéré d'entendre les gens parler de moi. Cela ne m'inspire plus aucun sentiment de joie ou de fierté. Au contraire, cela me rend malheureux." (In Le curiste, p. 202).

"Il n'existe pas d'homme assez patient ou épuisé pour pouvoir tout supporter ; même le récipient le plus grand déborde un jour." (In Le curiste, Souvenirs d'une cure à Baden (1949) p. 203).

"Malgré tout ce que je peux prétendre, je suis vraiment un homme oisif qui gaspille son temps, aime la tranquillité et répugne à travailler ; ne parlons pas des autres vices." (In Le voyage à Nuremberg, p. 21).

"En  dehors de la Forêt Noire où se situe ma ville natale, cette région autour de Locarno est la seule qui au cours de mon existence m'a vraiment donné le sentiment d'être chez moi." (In Le voyage à Nuremberg, p. 37).

"Je suis un homme de l'ancien temps. En effet, je ne condamne ni ne hais les émotions et la sentimentalité. Qu'est-ce qui nous fait vivre en vérité ? N'est-ce pas les émotions qui nous donnent l'impression d'exister réellement ?." (In Le voyage à Nuremberg, p. 42).

"Mes sentiments me sont mille fois plus précieux que toute l'énergie que les hommes peuvent déployer. Eux seuls ont su m'empêcher pendant la guerre de partager le sentimentalisme dévoyé des hommes d'action et d'être enthousiasmé par les coups de fusil." (In Le voyage à Nuremberg, p. 44).

"Sur une longue période, je n'ai jamais réussi à entrer dans un cercle d'amis, à me rattacher à un groupe quelconque et à vivre avec les autres. Jamais je n'ai pu être en symbiose permanente avec les gens." (In Le voyage à Nuremberg, p. 50).

"J'ai lu avec ferveur un grand nombre de poèmes tout au long de mon adolescence, mais jamais plus des vers ne m'envoûtèrent autant que ceux de Höderlin lorsque j'étais enfant. Plus tard, âgé de vingt ans, je ressentis la même fascination en lisant Zarathoustra ." (In Le voyage à Nuremberg, p. 63).

"Les gens comme nous se contentent de peu, mais exigent uniquement le meilleur." (In Le voyage à Nuremberg, p. 64).

"Même si ce n'est que pour une petite heure de répit entre deux crises, je me place du côté du bouffon pour observer la prétendue réalité en essayant de tendre des passerelles fragiles et flottantes au-dessus de l'abîme qui me sépare d'elle, qui éloigne l'idéal de l'expérience." (In Le voyage à Nuremberg, p. 66).

"Pour moi qui depuis vingt ans vit loin du pays natal, il est extraordinairement agréable et réconfortant de m'apercevoir de temps à autre qu'il existe encore quelques personnes ayant partagé mon enfance, m'ayant appelé par mes surnoms d'écoliers, et auxquelles je ne peux pas mentir." (In Le voyage à Nuremberg, p. 68).

"Je me crois pas que la littérature de notre époque ait de la valeur. Je comprends bien que chaque période a sa littérature, comme elle a nécessairement sa politique, ses idéaux et ses modes. Mais jamais je ne me déferai de la certitude que la littérature allemande contemporaine représente une entreprise éphémère et désespérée." (In Le voyage à Nuremberg, p. 78).

"J'admire sans réserve Goethe, Hölderlin, Kleist, les Romantiques. Leurs œuvres m'ont laissé une impression impérissable. [...]. Ce sont des créations accomplies qui échappent à l'emprise du temps, comme le pensent encore au moins d'innombrables contemporains. Au contact de ces œuvres  j'ai appris à aimer la littérature." (In Le voyage à Nuremberg, p. 80).

"Des livres isolés, plein de désespoir tels qu'Ecce homo de Nietzsche semblent de prime abord nous indiquer une voie. Mais en fin de compte ils montrent plus clairement encore qu'il n'en existe pas." (In Le voyage à Nuremberg, p. 81).

"Je crois en effet que j'ai une capacité d'abstraction supérieure à celle que l'on rencontre habituellement en Europe. Je connais mieux que tout autre cet état où le moi éternel en nous se penche sur le moi mortel et porte sur ses cabrioles et ses singeries un regard plein de pitié, de moquerie et de détachement." (In Le voyage à Nuremberg, P. 83).

"On m'écoute dans le plus grand silence car je donne le sentiment d'être un homme qui a effectivement quelque chose à dire." (In Le voyage à Nuremberg, p. 85).

"Tout au long de ma vie comme au cours de ce voyage, j'ai été accompagné par des morts, ou plutôt des êtres immortels. Les paroles de ces hommes disparus depuis longtemps sont encore bien vivantes en moi, leurs pensées ont façonné mon esprit, leurs œuvres ont fait du monde insipide un univers plein de beauté où il m'est devenu possible de vivre." (In Le voyage à Nuremberg, p. 94).

"Non, il n'était pas nécessaire de prendre ce monde étrange au sérieux, il n'était pas nécessaire de lui faire cet honneur." (In Le voyage à Nuremberg, p. 98).

"Une fois de plus, je sentais violemment s'opposer en moi deux pôles de ma personnalité, je sentais osciller les passerelles aériennes au-dessus de l'abîme qui sépare le réel de d'idéal, la réalité de la beauté." (In Le voyage à Nuremberg, p. 98).

"Je n'ai jamais beaucoup étudié l'histoire et tire toutes mes connaissances des écrivains que j'ai lus." (In Le voyage à Nuremberg, p. 104).

"Dans les moments où submergé par toutes ces discussions inutiles, je m'étais senti las de voyager, j'avais aussi éprouvé une nostalgie passagère pour mon ermitage lointain." (In Le voyage à Nuremberg, P. 111).

"Tout semblait prêt à s'effondrer dans l'heure suivante car plus rien n'avait de sens ni d'âme." (In Le voyage à Nuremberg, p. 113).

"Ce fut peut-être le moment le plus heureux de mon voyage. J'étais de retour à Munich, j'étais encore en vie, tout était terminé, je n'aurai plus jamais besoin de faire des conférences." (In Le voyage à Nuremberg, p. 117).

"Je passai aussi une soirée chez Thomas Mann. Je voulais lui montrer que mon affection pour lui, pour ce qu'il était n'avait pas disparu. Je désirais un peu voir aussi où il en était maintenant ; Voilà en effet un homme qui accomplit son travail avec une constance et une application immenses et semble pourtant profondément connaître les interrogations et les désespoirs de notre métier." (In Le voyage à Nuremberg, p. 119).

"Je suis toujours entraîné d'un lieu à un autre : aujourd'hui vers Munich, demain vers Zurich, puis à nouveau vers mon point de départ à la recherche de quelque chose, poussé par le désir de fuir la douleur, par le désir de repousser encore un petit instant l'arrivée de la mort." (In Le voyage à Nuremberg, P. 121).

"Peut-être que je cache en moi, comme je l'ai parfois pensé, quelque chose qui me rapproche d'un humoriste ; dans ce cas tout allait bien. Mais ce don n'était pas encore arrivé à maturité ; je n'avais tout simplement pas assez souffert." (In Le voyage à Nuremberg, Dernière phrase).

"Qui dit chercher dit avoir un but. Mais trouver, c'est être libre, c'est être ouvert à tout, c'est n'avoir aucun but déterminé." (Cité par Charles Juliet In Ces mots qui nourrissent et qui apaisent : phrases et textes relevés au cours de mes lectures. POL, 2008).

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